Ils avaient pris leurs quartiers dans une de ces villes d’Europe centrale où les églises, les synagogues, les façades Renaissance, les fastueux palais baroques, les immeubles Art Nouveau de l’Ancien Empire rivalisaient dans le chantourné, le convulsif et l’ondulatoire…
Les journées se passaient aux terrasses des cafés, à déguster lentement d’amers expressos, à lire un livre, à l’annoter selon l’humeur, à dessiner dans les marges, ou assis sur les bancs publics des promenades (portant les noms des écrivains célèbres qui les avaient occupés) à regarder flâner des jeunes filles aux cheveux en tresses ou en cascades et aux jambes fuselées, passer des séminaristes ensoutannés, des colonies d’enfants des campagnes environnantes menés par des religieuses en cornette, des athlètes bronzés zigzagant en rollers, des ashkénazes manteau flottant, chapeau noir et papillotes, tandis que résonnaient sur les pavés de la vieille ville, les sabots des attelages des droschken conduits par des femmes en chapeau melon.
Les pies et les corbeaux criaillaient dans les grands arbres des plantations qui avaient remplacé les remparts, il restait quelques tours phagocytées par des couvents et une barbacane en briques avec des toits pointus.
Ainsi s’écoulait notre temps…
Il va de soi que le créateur de ce dessin-texte ne met pas de nom propre à la fin de cette évocation de la ville d’Europe centrale sur laquelle il a jeté, à l’imparfait, son dévolu. La forme indéterminée est plus heureuse que la fléchette plantée précisément sur les majuscules d’ un atlas touristique .
L’énigme est évidemment faite pour être déchiffrée aisément par les voyageurs qui ont eu le bonheur de séjourner à Cracovie car Daniel a parsemé sa chronique d’indices ou de symboles clairs comme l’eau de la Vistule … dont le dragon du Wawel, dont… la colonne Jean-Paul II, dont… le Juif expiatoire , dont… les « Planty » circumambulatoires, dont …dont …
Le plus évocateur curieusement pour moi, ce sont « les amers expresso » qui ont un tel goût de « revenez y » que c’est décidé : juillet ne passera pas avant que je ne remette les pieds sur le Rynek et je prévoirai d’y emporter un livre à annoter, un Milosz ou un Mrozek …ainsi s’écouleront quelques heures de mon été continental.
Daniel, masterpiece !
un régal .
J’ai eu la visite de Natali Fortier & Guy Kayser hier… on se disait qu’il faudrait organiser une revoyure !
Meilleures pensée à toi et Ewa.
benoît
Et pendant que Georges et sa romantique compagne, tels des personnages de Veit Stoss, arrêtaient le temps sur des places médiévales, des séquanais joyeux chaviraient dans la vase et le champagne – un peu consolés de leur absence par les éclats de rire d’une Belle Jardinière bouclée… Au prochain opéra!