Nous nous étions installés, non sans mal, dans le palais à demi en ruines, en haut de la falaise. La végétation l’avait en partie envahi, les racines s’insinuaient dans les fentes, les lianes étranglaient les colonnes. Dans le silence de la nuit, nous entendions tomber des pierres, s’écraser au sol des plâtres, s’effondrer des balustres. Les chauves-souris s’envolaient de panique. J’en trouvais parfois sur le carrelage de ma chambre qui clapclapaient désespérément de leurs ailes molles.
Le jour, j’étudiais les plantes et les fleurs qu’avait rapportées le Voyageur de ses explorations. Je dessinais des pistils exubérants, des étamines voluptueuses, des anthères, des stigmates… Je déchiffrais les rébus scarifiés sur des feuilles de palmier, trouvés au fond des grottes sacrées…
Mais ce soir, le Voyageur nous presse de partir, les indigènes ont entendu les râles de la Terre, notre présence a réveillé la Tortue-dragon, celle qui porte le Monde sur sa carapace.
De cette fuite, ne me reste que quelques feuilles de mon carnet de voyage, trempé par la pluie tropicale, soudain survenue.